lundi 4 octobre 2010

S'abandonner dans un courant sans nom


19 juillet :
Notre identité est ici connue, reconnue et redoutée ; nous sommes européens donc riches, donc supérieurs. Pour éviter les rapports de force qui nous placent dans un avantage douteux, il faut mettre toute notre énergie à nous changer et nous transformer ; nous devons absolument, pour réussir notre voyage, inverser le rapport de pouvoir.
Alors nous nous dévêtons de tout savoir - c'est-à-dire de tout mot ou toute notion préalable -, tout argent et toute idée ; nous nous construisons de ceux que nous rencontrons, de ceux qui nous prennent en stop ou nous accueillent. Par un calcul méthodique et méticuleux nous éliminons de nous tout ce qui peut nous constituer en tant que force. Cette fragilité nous permet de trouver les gens, de leur parler et de leur enlever leur masque de méfiance, malgré tous les risques qu'elle implique et toute l'angoisse que, nécessairement, elle charrie.
C'est un choix difficile à prendre, un sacrifice douloureux mais nécessaire à faire pour voyager.
Notre perte est aussi profonde que possible, notre abandon aussi absolu que notre recherche d'humain est avide.

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