jeudi 31 mars 2011

Pano pas droit







réalité écarquillée, réalité bousculée.

mercredi 30 mars 2011

le parleur


Mon pope préféré, toujours l'oeil humide quand il prêche.

dimanche 27 mars 2011

Picture for women


Jeff Wall - Picture for women

Manet - Un bar aux Folies Bergère
Jeff Wall a beaucoup réfléchi à la remarque que Clement Greenberg fit à l'ouverture d'un article : "La photographie est le plus transparent des médiums conçus ou découverts par l'homme." Greenberg est aussi le critique qui a insisté sur la spécificité du médium pictural comme moteur de la peinture moderniste, mouvement qu'il fait commencer avec Manet  qui défait la convention de transparence voulue par la perspective héritée de la Renaissance et qui opacifie son médium. Si la photographie est "le plus transparent des médiums", c'est-à-dire si l'on ne peut pas signaler la forme, le support, l'objet photographique par son épaisseur, son grain, la touche de son auteur, cela signifie pour Greenberg qu'elle est inapte à la modernité artistique.
Ainsi, quand Jeff Wall reprend Un bar aux Folies-Bergère, ce n'est pas seulement un remake, ou une réflexion sur le désir et le jeu des regards, c'est aussi, et surtout, la réponse qu'il a trouvé au problème de Greenberg, la solution par laquelle Wall rend visible l'invisibilité du plan pictural en photographie, comme Manet l'avait commencé en peinture un siècle auparavant.
    C'est l'idée presque géniale du miroir qui peut être à la fois transparent et réfléchissant, c'est-à-dire qui fait de cette photographie à la fois un "tableau-fenêtre" (comme la tradition picturale classique l'avait imaginé) et un "tableau-miroir" qui opacifie la photo dans une démarche réflexive. Jeff Wall est donc devant le miroir qu'il photographie, nous le savons puisque nous le voyons avec son appareil photo et son déclencheur à la main ; il est donc à l'extérieur du tableau-fenêtre, suspendant ainsi la convention que nous devons immédiatement rétablir en suivant son regard qui tombe sur la figure féminine, au premier plan. Par l'éclairage, la position et le regard lointain de Jeff Wall, nous comprenons que les deux personnages ne sont pas dans le même espace, le plan pictural est alors comme une vitre transparente, comme une fenêtre.
Mais nous savons, notamment en retraçant consciencieusement le regard de Jeff Wall, qu'en fait les deux personnages sont bel et bien du même côté du miroir et que l'homme regarde en fait la femme de face dans le miroir et non de dos dans la réalité. Et si la femme est dans le même espace que le photographe, elle n'est plus alors figure ou modèle mais spectatrice dans le miroir du spectacle qu'offre le photographe ; son regard nous confirme dans cette hypothèse puisqu'elle ignore, comme dans la plupart des tableaux de Manet ,d 'ailleurs, le spectateur réel (nous) et semble, en plantant son regard juste à côté de nous, attendre quelque chose derrière nous, chercher quelqu'un du regard.
De regardeurs nous sommes alors passés à regardés mais non représentés, et nous savons que pour guider son regard vers nous, le jeune femme regarde en fait l'appareil photo. Cette situation qui est la situation réelle de toutes les prises de vue est assez difficile à concevoir, tant la femme nous regarde fixement, et tant elle tourne le dos à l'appareil !
De là provient la beauté moderniste de cette photographie, à la fois tellement picturale et parfaitement photographique : elle rend visible l'invisibilité du plan pictural sans rien cacher du processus, dans une absolue visibilité aveuglante. Jeff Wall démontre qu'une démarche moderniste est possible en photographie, qui plus est une démarche qui n'est pas imitée de la peinture mais intrinsèquement photographique.

analyse par Thierry de Duve, Le photo-peintre de la vie moderne

Répacitulons

Nota


jeudi 24 mars 2011

Condensé et notes sur La chambre claire

  DEUXIEME PARTIE

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Roland Barthes ouvre cette partie par la quête de la "bonne photo" de sa mère décédée, c'est-à-dire photographiquement bonne et qui lui permettrait de faire revivre le visage aimé ; une photo qui pourrait plaire à des gens qui n'ont aucun affect pour sa mère : une photographie qui serait à la fois intime et universalisable.
Par ce désir de transcender le moment intime, Barthes semble anticiper sur le travail d'une génération de photographes dont le travail portera justement sur la mémoire de l'instant et l'esthétisation de la vie quotidienne, génération notamment représentée par Nan Goldin.

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Barthes remarque que la pénétration de la photographie lui est interdite par la force de l'Histoire dont la photographie serait le révélateur ("l'Histoire c'est simplement ce temps où nous n'étions pas nés") ; l'Histoire nous sépare des photos, nous éloigne, tire ceux que nous connaissions vers un passé qui nous est inconnu. Je suis stupéfait de voir mes familiers autrement, c'est-à-dire extérieurement différents, parce la photo montre d'abord, montre surtout et exacerbe l'enveloppe extérieure des choses.

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Reconnaître quelqu'un sur une photo c'est souvent reconnaître un morceau de cette personne, et non pas son être-même ; la photographie ne donne jamais l'essence d'une chose, si fort qu'on la désirât, mais toujours une interprétation de la réalité : l'image, jamais l'absolu.

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Malgré tout, l'essence d'une personne peut s'exprimer dans une expression saisie au vol, "l'expression vraie", le trait intime hors jeu, hors système et hors monde qui résume, qui caractérise si précisément et si clairement une individualité en un éclair si difficile à exprimer par des mots.
Barthes trouve finalement l'essence de sa mère qu'il recherchait si follement dans une image qui réalise alors "la science impossible de l'être unique".

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J.J. Goux, dans une interprétation freudienne de l'image par la religion explique que le judaïsme a refusé l'image pour ne pas risquer d'adorer la Mère tandis que le christianisme, rendant possible la représentation, avait dépassé la Loi au profit de l'Imaginaire. Fasciné comme Barthes par la photo d'une personne disparue, on s'abandonne ainsi à l'Image, à l'Imaginaire.

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L'essence-même de la photo, son noème, sa caractéristique la plus forte est sa co-naturalité avec le référent ; le référent photographique est la chose nécessairement réelle qui a véritablement été placée devant l'appareil. Je ne peux jamais nier que la chose a été là, chose qui prend alors une double position : de réalité et de passé.
Cependant, le référent photographique, le sujet de la représentation, peut être fondamentalement différent du référent subjectif, c'est-à-dire l'objet que la photo donne à voir et donne à penser. Le gouffre qui sépare le sujet - réel - de l'objet - subjectif - révèle un mécanisme fondamental du rapport de l'homme au monde et ouvre une dichotomie majeure dans son rapport à la photo : le réel - parfois tragique, parfois grave, et toujours politique - et sa nécessaire interprétation (c'est-à-dire sa nécessaire imagination et création, l'art).
Enfin, l'émotion de la photographie est unique et paradoxale puisqu'elle tend à mêler le sentiment de la vérité de l'interprétation d'une chose à la preuve tangible de son existence.

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La seconde chose qui fonde la nature photographique, c'est la pose, l'instant immobilisé. C'est la grande différence avec le cinéma : "quelque chose s'est posé", en photographie, contre "quelque chose est passé", au cinéma. Cette différence établit une phénoménologie différente, un art différent.
On peut souligner aussi l'autre grande différence entre photographie et cinéma : l'immobilité non pas du sujet photographique (qui, au fond, peut aussi "être passé" et n'avoir laissé qu'une trainée de grains) mais du médium lui-même : la photographie se présente comme la peinture, comme une véritable "œuvre" tandis que le cinéma, en mouvement et en durée, s'apparente par son récit, par sa diffusion et sa réception à la littérature (qui ignore aussi l'Objet et offre seulement un contenu).
La photographie n'est jamais métaphorique, elle certifie d'une existence passée et d'une présence réelle : c'est pourquoi la photo peut devenir nostalgique, quand elle représente des proches morts, ou horrible quand elle montre des cadavres (elle certifie la présence dans le monde, dans la vie, de ce qui est précisément pour nous le symbole de la mort). La photo introduit une confusion perverse entre le Réel et le Vivant, comme contredisant l'expérience existentielle d'Héraclite (je peux regarder deux fois le même visage). Pire encore, déportant le réel vers le passé, la photo suggère qu'il est déjà mort. La photo semble rendre possible la diffusion de la preuve expérimentale ("preuve-selon-St-Thomas") ; mais cette absence potentielle de médiateur, de méthode et la certitude de réalité rendent dangereuses ces images, qui sont toujours une interprétation de la réalité, pour un public non initié.

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La photographie n'est absolument pas proustienne parce qu'elle ne remémore pas le passé, elle atteste seulement que quelque chose a été. Elle induit cependant un vertige du temps, du lieu et du corps dont elle est directement une émanation ; et, devant une photo de foule à tel lieu ou telle date je peux me dire "Peut-être j'y étais ; peut-être j'y suis", peut-être cette photo contient un peu de moi, un peu des photons que j'ai envoyé et que la photo a piégés. Cet étonnement d'avoir été là à ce moment, et d'être ici sur une image rappellent encore la présence immédiate que pose la photo, présence à la fois d'ordre politique (je participe aux événements par l'image) et métaphysique.

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La photographie crée un objet d'un nouvel ordre : ni image, ni réel, un être nouveau et qu'on ne peut pas toucher, entre deux temps, deux lieux, deux objets.

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Contrairement au cinéma, la photo rompt avec le "style constitutif", elle est "sans avenir", elle ne présume pas que l'expérience continuera constamment, et c'est là son pathétique.
La photo n'est pas dialectique, elle ne convertit pas l'émotion, la tristesse du deuil, la contemplation : je contemple le théâtre mort de la mort (l'immobilisation du temps ne se donne que sous un mode excessif, monstrueux)
La photo bloque le souvenir, et devient un anti-souvenir : elle exorbite le sujet et emplit de force la vue alors qu'en elle rien ne peut se refuser ni se transformer.

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La photo a quelque chose à voir avec le "crise de mort" qui commence au XIXème siècle ; aujourd'hui, c'est la façon que nous avons d'assumer la mort qui n'est plus dans l'ordre du religieux. Avec la photo, la mort devient asymbolique, hors religion, hors rituel, nous entrons dans "la mort plate" : horreur profonde de la mort, justement, sa platitude, son "rien à dire", rien à dire de la photo d'un être cher disparu que l'on ne peut approfondir ou transformer. Nous ne faisons que parler de ce "rien à dire".

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La pensée de la mort est inséparable de la photo, elle nous fait revivre l'angoisse de la mort même si celle-ci à déjà eu lieu. Le temps de la pose vient bousculer mon temps de spectateur.

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Le mode de lecture d'une photo est un mode privé, et donc le mode de réception des photographies même les plus impersonnelles (par exemple un reportage) est privé : l'âge de la photo correspond précisément à l'irruption du privé dans le public, ou d'une nouvelle valeur sociale : la publicité du privé.

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Parfois, dans une visage, la photo fait apparaître ce qu'on ne perçoit jamais, un trait, un air de quelqu'un. La photo donne une vérité morcelée et qui tient du lignage, de la génétique ; cette identité, cette filiation est plus rassurante, plus forte, plus apaisante que l'identité civile, mais en même temps elle souligne malignement les différences entre les membres d'une même famille.

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Blanchot disait que l'image doit être toute dehors, accessible et cependant mystérieuse, sans signification mais appelant la profondeur de tout sens possible. Si l'on n'approfondit pas la photo, c'est justement à cause de sa force d'évidence qui bloque en nous l'interprétation.

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Lorsqu'il s'agit de la photo d'un être, et qui plus est d'un être aimé, l'enjeu est totalement différent : puisque la photo authentifie son existence, je veux retrouver cette personne en entier, c'est-à-dire en essence. La photo devient douloureuse parce qu'elle ne peut pas répondre à ce désir fou que par quelque chose d'indicible et d'évident : "l'air". L'air est comme le supplément intraitable de l'identité, peut-être est-il le reflet d'une valeur de vie : une photo d'Avedon nous fait lire un air de bonté. Quoiqu'il en soit, l'air nous permet de retrouver en photo une personne que nous avons connue et aimée.

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La photo accomplit la confusion inouïe de la réalité(cela a été) et de la vérité (c'est ça !), elle porte l'effigie  à ce point fou où l'affect est garant de l'être.

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L'évidence du noème de la photographie peut être sœur de la folie : la photo est une évidence poussée, comme si elle caricaturait l'existence de ce qu'elle représente. L'image, en phénoménologie, est un néant d'objet. La folie de la photo est de nous assurer du passé sans relais, immédiatement ; la photo devient alors un medium bizarre, une nouvelle forme d'hallucination. Image folle, frottée de réel.
L'émotion photographique a toujours quelque chose à voir avec la souffrance d'amour, ou plus précisément avec le sentiment de Pitié.

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La société s'emploie à assagir la Photographie, à tempérer la folie qui la menace en en faisant d'abord un art, car aucun art n'est fou, ou encore en généralisant la photographie, en la grégarisant, en la banalisant : par ce biais, la société transforme nos vies en images et elle déréalise complètement le monde humain des conflits et des désirs comme dans ces boites de porno où le vice n'est plus présent qu'en image, où la jouissance passe par l'image. L'ennui nauséeux du monde qui s'en dégage appelle le cri des anarchismes, marginalismes et individualismes : abolissons les images, sauvons le désir immédiat !
On peut assagir la photo si son réalisme reste un réalisme relatif, tempéré par des habitudes esthétiques ou empiriques ; mais si ce réalisme est absolu, la photographie reste folle et retourne le cours du Temps dans un mouvement propre qu'on appellerait alors l'extase photographique.

mercredi 23 mars 2011

Concours Sony, photo IX


Dernière photo : un homme nouveau, un homme sombre, fou et violent. Un chef, un fasciste.

Concours Sony, photo I








L'esthétique du corps viril, la beauté par-delà les mots. Il y a un petit côté pub de parfum dans les photos, mais c'est difficile de faire une photo comme ça sans tomber un peu dans le cliché...

lundi 21 mars 2011

Concours Sony, photo VII


























On atteint une dimension christique à la septième photo, la dimension du gourou.

dimanche 20 mars 2011

Concours Sony, photo IV





























Quatrième temps : l'action collective, politique.

samedi 19 mars 2011

Concours Sony, photo VIII



























Huitième sur neuf, vous aurez compris que dans cette photo les choses se corsent... La fin de la parole, c'est aussi la fin de l'intelligence.

vendredi 18 mars 2011

Concours Sony, photo VI

Concours Sony, photo III


























La série est en désordre, c'est parce que j'ai besoin de vos avis...

Nan


Référence...

how many summers will I wait ?


jeudi 17 mars 2011

samedi 12 mars 2011

mercredi 9 mars 2011

sourires


Concours Sony, plan d'attaque

Tout part d'un énoncé caricatural et simpliste, d'affirmations ambigües ou dangereuses et d'assertions anti-intellectualistes. Il vaut mieux agir que parler, on dirait les fins de conversations de comptoir ; l'action vaut mieux que les paroles, on dirait le slogan d'un groupe d'activistes d'extrême-droite : ne réfléchissez plus, agissez !
Partant d'une idée simple et apparemment anodine, on aboutit finalement à la plus dangereuse des doctrines, l'anti-intellectualisme populiste prônant l'action directe, immédiate, violente et radicale. Une des raisons qui peuvent expliquer le ralliement fréquent de certains groupes d'action de gauche aux partis fascistes de droite (notamment en italie et allemagne des années trente, mais encore aujourd'hui, et en france).  Le fascisme se caractérise par le glissement imperceptible qui nous attire à lui si nous n'y prenons garde.
J'essaierais donc par mes photos de traduire et de dénoncer ce glissement insidieux, cet engluement de la pensée dans le proverbe populaire et dans les réponses trop faciles.

(chaque photo sera accompagnée d'un slogan en anglais (ils ne sont pas encore définitifs, mais s'il y a des fautes, n'hésitez pas à me le dire))
  1. le corps peut être en effet très beau (BODY'S BEAUTIFUL. ACTION IS WONDERFUL. (ou BODY'S BEAUTY DOESN'T NEED ANY WORD))
  2. à travers le corps, c'est toute la force de la vie qui s'exprime (DON'T READ IT, LIVE IT)
  3. l'action fonde la politique, qui est la défense de nos droits (IF YOU DON'T, NOBODY'S GONNA DO IT FOR YOU)
  4. parfois les mots empêchent justement d'agir rapidement et efficacement (PEOPLE TALKING NEVER DO ANYTHING)
  5. il faut assumer nos responsabilités et prendre le courage d'agir et de défendre nos idées
  6. il ne peut d'ailleurs y avoir qu'une seule vérité, qu'une seule pensée qui soit juste
  7. les livres et les penseurs dissidents sont donc dangereux et doivent être corrigés
  8. le fanatique (STOP THINKING, ACT.)
il me restera encore deux photos pour peut-être affiner des transitions trop brutales.
je réfléchis maintenant aux images, si vous avez des idées ou des objections sur le concept ou sur la mise en images, n'hésitez pas à m'en faire part.

World Press

Jodi Bieber ; portrait de l’Afghane Bibi Aisha, une jeune fille de 18 ans mutilée (nez et oreilles coupés) par son mari.
 La platitude de l'évidence photographique est aussi sa force ; ici elle frappe de plein fouet et nous stupéfait de son bête étalage banal d'une réalité aussi tragique. Jodi Bieber gagne cette année le Word Press de la photo de l'année, et le premier prix dans la catégorie "Portrait".

Ricardo Venturi ; Incendie du vieux marché en fer, Port-au-Prince 18 janvier 2010
Dans les prix World Press, la photo de Ricardo Venturi a gagné le 1e Prix catégorie "General News Single".

dimanche 6 mars 2011

J'arrive, bien sûr j'arrive


L'été à Kiev

L'été est étrange dans les photos de Yelena Yemchuk, comme un rêve éveillé. Il est parfois absurde, hors du temps, peuplé d'être fantasmagoriques ; il est parfois sensuel et drôle. Il est cynique et attendrissant, comme un portrait de famille fatigué de trop connaître et les gens et le décor, comme décalé, doucement ironique.
Mais derrière la façade de dérision et de moquerie se cache une vraie solitude et une vraie tristesse. Pire : le désespoir.

samedi 5 mars 2011

jeudi 3 mars 2011

Bucherons de père en fils


Actions speak louder than words

Voici l'intitulé de la finale (car je suis finaliste) du Student Focus de Sony qui est enfin tombé (ici l'énoncé complet)...
Je dois là-dessus produire entre 6 et 10 photos. J'ai un peu moins d'un mois. Serré.
Si vous avez des idées, n'hésitez pas. Je réfléchis beaucoup pour l'instant ; je ne sais pas encore quel genre de photo je vais faire. J'ai trois alternatives : soit "le réel choisi", c'est-à-dire après réflexion, essayer de trouver dans des situations réelles ce qui me convient ; soit "le réel joué" : par des mises en scène, tenter de construire du sens tout en imitant le vraisemblable et le véritable ; enfin "le jeu assumé", stratégie picturale qui déjoue la représentation en assumant la mise en scène et construit du sens plus librement.
Quelques pistes de réflexions qui ne sont pas encore triées ni rangées :
  1. est-ce que parler ou écrire (utiliser des mots) ce n'est pas déjà une action ?
  2. "Au commencement était le Verbe - et le Verbe était avec Dieu - et le Verbe était Dieu." (Jean I, 1)
  3. il y a dans ce sujet, au premier abord, quelque chose qui m'irrite d'une radicalité puérile
  4. comme si l'on opposait l'efficacité et la beauté.
  5. il y a le côté sartrien : on est ce qu'on fait ; on assume la responsabilité et les conséquences de nos actes.
  6. l'idée qu'on peut tricher les mots, et pas les actions ; peut-être je pourrais m'intéresser à ces métiers du mensonge du geste (acteur, danseur, politicien...)
  7. dans Borges, Le livre de sable, l'idée chrétienne que désirer quelqu'un c'est déjà commettre l'adultère. la pensée performative (Austin Quand dire c'est faire)
  8. il n 'y a pas de pensée sans action ou sans conséquence. on est responsable aussi de ses pensées et de ses paroles.
  9. "actions" peut ici faire référence à l'acte de prendre une photo. effectivement, prendre une photo, c'est toujours agir, réagir, interagir. réfléchir à l'action photographique.
  10. distinguer différentes sortes d'action : les actions verbales, les actions photographiques, les actions politiques...
  11. le sujet qu'on me propose n'est-il pas uniquement composé de mots ? ne suis-je pas en train d'y répondre uniquement par des mots ? ("je suis l'alpha et l'oméga") Tout part des mots et y finit.
  12. référence barthésienne : la langue est fasciste justement en ceci qu'elle n'admet pas d'en dehors. l'illusion de sortir des mots par les actions. comment sortir des mots ?
  13. il faut se méfier de l'illusion de la pureté métaphysique de l'action comparée à la complexité dialectique de la pensée. l'une et l'autre sont inextricablement liées, conséquence l'une de l'autre, s'abolissant tout en se fondant.
  14. l'action politique n'est-elle pas faite avant tout de discours ?
  15. est-ce que par ce sujet, ce qu'on me propose ce de préférer la chose elle-même, pure, immédiate, plutôt que sa représentation ? mais alors la photo comme le mot n'est-elle pas une représentation du réel ? n'est-elle pas qu'un moyen supplémentaire, différent, de dire le réel ? et l'action peut-elle être autre chose que sa représentation ? l'image n'existe que tant qu'elle parle ("actions speak"), et elle parle nécessairement. on n'accède jamais à l'action pure, mais toujours à une représentation, médiatisée par nos sens et notre esprit (à l'inconscient structuré comme un langage) : image-nécessaire et image-piégée ou manipulée.
    Au commencement le Verbe était – et le Verbe était avec Dieu – et le Verbe était Dieu. Bible | Dico - Citations - Dico citationsAu commencement le Verbe était – et le Verbe était avec Dieu – et le Verbe était Dieu.
Premiers concepts : le Boxeur, ou la force brute, l'action immédiate ; le Penseur, ou la parole paralysante ; l'Amour, ou la nécessaire action, l'impossible parole (bien que finalement plus prolifique que sur aucun autre sujet, justement) ; le Mur, ou l'action impossible (le mur existentiel (cf Sartre)) ; le Prêcheur, ou la parole-action (ou bien l'Écrivain, ou l'Orateur) ; les Mains, ou les outils ; l'Artiste, ou la représentation-reine ; le Fanatique, la beauté faite politique, la vie pour un mot (ou une idée) ; l'Homme politique : la pensée-action ; le Danseur, l'action-beauté...

soleil fade ; menton droit