Voici l'intitulé de la finale (car je suis finaliste) du Student Focus de Sony qui est enfin tombé (ici l'énoncé complet)...
Je dois là-dessus produire entre 6 et 10 photos. J'ai un peu moins d'un mois. Serré.
Si vous avez des idées, n'hésitez pas. Je réfléchis beaucoup pour l'instant ; je ne sais pas encore quel genre de photo je vais faire. J'ai trois alternatives : soit "le réel choisi", c'est-à-dire après réflexion, essayer de trouver dans des situations réelles ce qui me convient ; soit "le réel joué" : par des mises en scène, tenter de construire du sens tout en imitant le vraisemblable et le véritable ; enfin "le jeu assumé", stratégie picturale qui déjoue la représentation en assumant la mise en scène et construit du sens plus librement.
Quelques pistes de réflexions qui ne sont pas encore triées ni rangées :
Premiers concepts : le Boxeur, ou la force brute, l'action immédiate ; le Penseur, ou la parole paralysante ; l'Amour, ou la nécessaire action, l'impossible parole (bien que finalement plus prolifique que sur aucun autre sujet, justement) ; le Mur, ou l'action impossible (le mur existentiel (cf Sartre)) ; le Prêcheur, ou la parole-action (ou bien l'Écrivain, ou l'Orateur) ; les Mains, ou les outils ; l'Artiste, ou la représentation-reine ; le Fanatique, la beauté faite politique, la vie pour un mot (ou une idée) ; l'Homme politique : la pensée-action ; le Danseur, l'action-beauté...Je dois là-dessus produire entre 6 et 10 photos. J'ai un peu moins d'un mois. Serré.
Si vous avez des idées, n'hésitez pas. Je réfléchis beaucoup pour l'instant ; je ne sais pas encore quel genre de photo je vais faire. J'ai trois alternatives : soit "le réel choisi", c'est-à-dire après réflexion, essayer de trouver dans des situations réelles ce qui me convient ; soit "le réel joué" : par des mises en scène, tenter de construire du sens tout en imitant le vraisemblable et le véritable ; enfin "le jeu assumé", stratégie picturale qui déjoue la représentation en assumant la mise en scène et construit du sens plus librement.
Quelques pistes de réflexions qui ne sont pas encore triées ni rangées :
- est-ce que parler ou écrire (utiliser des mots) ce n'est pas déjà une action ?
- "Au commencement était le Verbe - et le Verbe était avec Dieu - et le Verbe était Dieu." (Jean I, 1)
- il y a dans ce sujet, au premier abord, quelque chose qui m'irrite d'une radicalité puérile
- comme si l'on opposait l'efficacité et la beauté.
- il y a le côté sartrien : on est ce qu'on fait ; on assume la responsabilité et les conséquences de nos actes.
- l'idée qu'on peut tricher les mots, et pas les actions ; peut-être je pourrais m'intéresser à ces métiers du mensonge du geste (acteur, danseur, politicien...)
- dans Borges, Le livre de sable, l'idée chrétienne que désirer quelqu'un c'est déjà commettre l'adultère. la pensée performative (Austin Quand dire c'est faire)
- il n 'y a pas de pensée sans action ou sans conséquence. on est responsable aussi de ses pensées et de ses paroles.
- "actions" peut ici faire référence à l'acte de prendre une photo. effectivement, prendre une photo, c'est toujours agir, réagir, interagir. réfléchir à l'action photographique.
- distinguer différentes sortes d'action : les actions verbales, les actions photographiques, les actions politiques...
- le sujet qu'on me propose n'est-il pas uniquement composé de mots ? ne suis-je pas en train d'y répondre uniquement par des mots ? ("je suis l'alpha et l'oméga") Tout part des mots et y finit.
- référence barthésienne : la langue est fasciste justement en ceci qu'elle n'admet pas d'en dehors. l'illusion de sortir des mots par les actions. comment sortir des mots ?
- il faut se méfier de l'illusion de la pureté métaphysique de l'action comparée à la complexité dialectique de la pensée. l'une et l'autre sont inextricablement liées, conséquence l'une de l'autre, s'abolissant tout en se fondant.
- l'action politique n'est-elle pas faite avant tout de discours ?
- est-ce que par ce sujet, ce qu'on me propose ce de préférer la chose elle-même, pure, immédiate, plutôt que sa représentation ? mais alors la photo comme le mot n'est-elle pas une représentation du réel ? n'est-elle pas qu'un moyen supplémentaire, différent, de dire le réel ? et l'action peut-elle être autre chose que sa représentation ? l'image n'existe que tant qu'elle parle ("actions speak"), et elle parle nécessairement. on n'accède jamais à l'action pure, mais toujours à une représentation, médiatisée par nos sens et notre esprit (à l'inconscient structuré comme un langage) : image-nécessaire et image-piégée ou manipulée.Au commencement le Verbe était – et le Verbe était avec Dieu – et le Verbe était Dieu. Bible | Dico - Citations - Dico citationsAu commencement le Verbe était – et le Verbe était avec Dieu – et le Verbe était Dieu.
Première idée, comme ça, à chaud : dans la photo faire cohabiter les mots et la chose qu'ils désignent (par exemple un sdf adossé à une affiche pour la banque alimentaire; une voiture écrasée contre une affiche de la prévention routière etc., bon faut sacrifier une bagnole, c'est le prix à payer...)
RépondreSupprimerL'action, en rhétorique, c'est le moment où l'on prononce le discours, le ton de la voix, les gestes, la théâtralité. Pour que l'action agisse, il faut encore qu'elle parle, qu'elle soit compréhensible comme discours...
Bof, demain, la suite.
Penser à Ulysse, Ulysse le rusé, Ulysse le polymétis, doué de l'intelligence des choses et de la parole, rusé, loué, mais dont on se méfie aussi.
RépondreSupprimerVoir par exemple Euripide qui le qualifie "d’enivrant séducteur des foules", "d'ennemi du vrai", en ce sens que la parole n'est pas la vérité, qu'elle peut même la travestir, et que nous ne pouvons juger quelqu'un que sur ses actes.
Pour Virgile aussi ulysse est un personnage noir, détesté par Enée (et pour cause puisque c'est par ses ruses et ses tromperies qu'il a fait chuter la triste Ilion).
Vous m'excuserez de n'avoir pas un propos plus approfondi mais bon hein je ne fais que lancer des idées je ne suis pas le concepteur du projet j'essaye de faire avancer le débat c'est tout.
"La prise de vue est essentiellement un acte de non-intervention. L'horreur inspirée par de mémorables réussites de nos photo-reporters contemporains - comme cette image d'un bonze vietnamien en train de s'asperger d'essence, ou celle d'un guérillero enfonçant sa baïonette dans le corps d'un collaborateur lié à un poteau - provient pour une part de cette impression qu'au moment où le photographe avait le choix entre la prise de vue et le sauvetage d'une vie, il a choisit la photographie. Celui qui s'interpose ne peut pas fixer la scène, celui qui fixe la scène ne saurait intervenir. Le très beau film de Dziga Vertov, L'Homme à la Caméra (1929), nous présente le photographe comme un homme perpétuellement en mouvement qui, sur le plateau panoramique où se déroulent des évènements très différents, se déplace avec tant d'agilité et de rapidité qu'il ne saurait intervenir en aucun cas."
RépondreSupprimerSusan Sontag
Les affirmations lapidaires du sujet sont souvent consternantes, peu étayées et donc facilement critiquables. C'est restrictif, provocateur et simpliste en apparence, mais il faut tout démonter. ("to debunk" en anglais). Tu as de chouettes idées. J'aime bien celle du mensonge ou de la photo comme représentation de l'action, mais la représentation par l'image n'est pas une mise en mots. D'ailleurs tout ce qu'on saisit du monde n'est qu'une représentation (on ne voit que le pour-soi et non l'en-soi selon Kant, nous sommes enfermés dans ce que l'on perçoit).
RépondreSupprimerIdées en vrac :
Action : le corporel, le faire, ce qui est saillant, qui est visible, le mouvement dans l'espace, le déplacement des corps
La révolution, les manifestations, l'action directe contre le verbiage de l'homme politique
Au théâtre : un "acte", acteur entre jeu et action
Au cinéma : "Action !" pour commencer le tournage
Action/moralité
La photo représente des actions dans un langage non-verbal
Mots : l'intellectuel, la pensée, la circularité des idées, l'audible, le non-visible, la communication, l'échec de toute communication
"Les paroles s'envolent les écrits restent", poids des mots ?
Le psychologue, les thérapies par le langage
Les performatifs
Le jargon, l'obscur, la tromperie
La photo ne permet pas de représenter le discours, seule la graphie ou calligraphie des mots écrits est un objet photographique.
Entre les deux :
Question de l'intention et adéquation entre les deux. Action du résistant en accord avec ses opinions, la pensée en actes.
Qu'est ce qui a la plus de poids : aider un juif pendant la guerre ou juste penser que l'on aimerait le faire ? (phrase provocatrice de Sartre "nous n'avons jamais été aussi libres que sous l'occupation allemande) Question de la responsabilité et du choix entre les actions ou les mots.
Slogan Paris Match "le poids des mots le chos des photos"
L'action de penser, fulgurance du procédé
L'ancienne écriture chinoise de haut en bas qui mime un homme se tenant debout
les ordres militaires qui commandent les actions dévastatrices, la propagande : l'action découlant de la parole
en définitive : parler, est-ce forcément le contraire d'agir ?
Ce qui m'intéresse le plus est de savoir en quelle manière photographier c'est agir, et quelle alternative aux mots peut proposer la photographie, art muet. Autre langage, "plus direct" et tout aussi menteur (les photos retouchées pour éliminer Trotsky). Illusion des images peut-être plus trompeuse que le verbe.
Ironie détestable du sujet qui n'existe que par le langage.