jeudi 30 décembre 2010

La critique des immortels


"[Le cinéma] est un divertissement d'ilotes, un passe-temps d'illettrés, de créatures misérables, ahuris par leur besogne et leurs soucis [...], un spectacle qui ne demande aucun effort, qui  ne suppose aucune suite dans les idées, ne soulève aucune question, n'aborde sérieusement aucun problème, n'allume aucune passion, n'éveille au fond des cœurs aucune lumière, n'excite aucune espérance, sinon celle, ridicule, d'une un jour "star" à Los Angeles."

George Duhamel, cité par Walter Benjamin in 
L'œuvre d'art à l'époque de sa reproductibilité technique

10 commentaires:

  1. Tout a été dit et l'on vient trop tard...
    A civilisation industrielle, loisir industriel. C'est dans l'ordre. Quant à la fureur baudelairienne ou rimbaldienne de faire du "nouveau" elle coïncide magnifiquement avec les premiers balbutiements de la publicité (voir l'illustre Godissart de Balzac). Tout est affaire de mode (opératoire).

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  2. On remarque surtout que derrière cette verve pourtant puissamment lyrique il n'y a en fait aucun argument.
    Ca me rappelle Baudelaire, je retrouverai le passage.

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  3. Il parle du cinéma américain des annés 30. C'est stupide de ne citer que ces qulques phrases sans développer les arguments, ni le contexte. Ici, c'était la question de considérer ou non le cinéma comme art. Tout le monde sait que le cinéma a une capacité à produire de l'art mais qu'il est en grande majorité utilisé comme divertissement aujourd'hui. Je dirais que c'est pareil pour tous les arts, seulement pour le cinéma, les vraies oeuvres d'art sont beaucoup plus difficile d'accès. Et pour ceux qui sont vraiment sceptique sur la capacité d'un film à faire réfléchir, vous n'avez qu'à arrêter de regarder des merdes. Il y a des films qui guident le spectateur, mais il y en a aussi d'autres. J'espère pour vous que vous avez un jour vu et saisi l'intérêt d'un vrai bon film. Sinon c'est que vous n'avez rien compris au cinéma et dans ce cas là, fermez vos gueules. On peut critiquer le cinéma comme Duhamel quand on est le seul à le faire. Mais quand tout le monde dit depuis des années que la plupart du cinéma est un divertissement qui ne fait pas réfléchir, il faut peut être changer de refrain et poser des questions qui font un peu plus avancer le débat, plutôt que de se complaire dans des citations sans les approfondir.

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  4. Je ne comprends pas pourquoi la critique de Duhamel serait vraie quand il est seul (et il n'était pas seul) à l'exprimer et deviendrait subitement fausse sous prétexte qu'on la cite (pour la combattre) et qu'on la partage... Explication ?
    Je n'ai pas trouvé les arguments, si tu les as, fais-moi en part et je rétablirai George dans son intelligence fulgurante.
    Je crois cependant qu'il parle du cinéma en général ; enfin, c'est ce que je ressens.
    Tu nous citerais de véritables œuvres d'art cinématographiques (pas pour te piéger, bien sûr, mais par réelle curiosité) ?
    Je crois que c'est un débat toujours important puisqu'il y a des gens qui dénient encore au cinéma son caractère artistique, non ?

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  5. J'ai pas dit que la critique était vraie parcequ'il était le seul à l'exprimer, je pense seulement qu'il peut se permettre ces propos dans son contexte en parlant d'un certain modèle d'aboutissement de l'oeuvre cinématographique dans les années 30: Mais en tout cas son texte n'est pas propice à la citation décontextualisée parceque ça c'est réellement quelque chose qui ne fait pas réfléchir.
    http://ens.perrinchassagne.net/pdf/cinemaduhamel.pdf
    Voici le lien, il parle du cinéma assez généralement, mais la phrase: "J’affirme qu’un peuple soumis pendant un demi-siècle au régime actuel des cinémas américains
    s’achemine vers la pire décadence." me fait penser qu'il parle du cinéma comme ce vers quoi il tend dans les années 30. C'est vrai qu'il rejette en bloc tous les films de l'histoire du cinéma, mais il faut savoir qu'au début les historiens du cinéma ne constituaient que des encyclopédies qui retraçaient les grands films, les grands noms du cinéma et montrait l'histoire du cinéma comme une constante évolution, on comprend donc un peu sa crainte. Je pense qu'il a tort d'occulter les films du cinéma soviétique des années 20 qui, utilisent vraiment le cinéma avec son propre langage. Pour moi, à partir du moment où on utilise les possibilités propres d'un support pour créer du sens, c'est de l'art. Donc si y a un débat, aujourd'hui sur le caractère artistique du cinéma, je trouve ça bête.
    J'ai pas trop envie de citer une oeuvre cinématographique artistique, parce que si j'en dit une qui en est incontestablement, elle sera carément manifeste du cinéma en tant qu'art (c'est tout le travail de Vertov), mais il y a de l'art plus discrêtement dans énormément de films.

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  6. Le texte complet est en effet aussi intéressant. Mais je persiste à croire qu'il critique le cinéma dans son principe. Des arguments qui font mouche et incitent à la réflexion.
    Je le publierai un de ces jours. On en rediscutera plus profondément à ce moment-là.

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  7. Moi je dis que vous enculez les mouches - sans leur consentement - ce qui n'est guère cordial. La question me semble être la suivante : y a t'il dans le cinéma en tant qu'art quelque chose de commun avec les autres arts qu'on appelle art ? Si oui, quoi ? Le mot n'est rien. Quelle réalité conceptuelle recouvre-t-il ? Il me semble que ce qui dit Duhamel pose cette question : le cinéma se propose-t-il, à travers des moyens originaux pour chaque nouvelle oeuvre, de déclencher une émotion esthétique et/ou Une réflexion stimulante sur l'être ? Comme Duhamel, j'en doute. Ou alors peut-être les quelques films que personne ne va voir... Dont acte. Le même snobisme règne dans le cinéma que dans tous les nouveaux arts mécaniques. Ceci n'est pas du "bon" rock, Ou du "bon" rap, ou du "bon" Warhol, ou de la "bonne" photo. Certes. le bon rock, le bon Wharol, la bonne photo, c'est quoi ?

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  8. le cinéma se propose-t-il, à travers des moyens originaux pour chaque nouvelle oeuvre, de déclencher une émotion esthétique et/ou Une réflexion stimulante sur l'être ? Moi je dis non pas pour chaque nouvelle oeuvre, mais toutes les photographies et toutes les musiques n'utilisent pas non plus toujours des moyens originaux. On se pose donc la question du nombre? Puisque tu dis qu'il qu'il n'y a que quelques films que personne ne va voir. Je peux aussi dire que personne ne va voir Doisneau, autant que personne ne va voir A bout de souffle. C'est seulement que le cinéma peut être un support plein de possibilités artistiques comme tout les éléments qui le composent (le scénario, l'image, le montage, le son, le commentaire, la musique originale). Tous ces éléments séparés ont déjà leur propre art, mais celui du cinéma c'est l'art du mouvement, ou peut être celui de la soumission du spectateur à un certain regard sur la vie. Mais en effet, le cinéma peut aussi être compris au degré le plus bas, et il a une capacité mimétique qui pousse beaucoup de gens à en faire une utilisation pas très poussée, qui n'a rien de subversive. Emotion esthétique oui, pour peu qu'on y soit sensible (exemple:www.youtube.com/watch?v=pKcJuvGi5LA) et réflexion stimulante, surtout quand on a étudié le cinéma, peut être. Aussi, il ne faut pas regarder les films qu'une seule fois, sinon, on ne voit qu'en surface. En fait, le cinéma est tellement codé, qu'il faut très bien maîtriser les codes pour comprendre où est-ce que c'est génial. Et là, ça va beaucoup plus loin que quand on a été enthousiasmé par la fin de Fight Club, par exemple.

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  9. Voilà une réponse claire et honnête. Bon, on peut tomber d'accord avec ça. Ajoutons encore ceci : quand on voit un tableau de Vermeer ou quand on lit quelques pages de Proust ou de Flaubert, on a du plaisir et en même temps on sent qu'il y a quelque chose de plus, qu'on ne voit pas tout, qu'il faudrait y revenir. Ce sentiment, très stimulant, me paraît caractéristique de l'oeuvre d'art véritable. Jamais aucun film, même pas les plus saugrenus films intello d'exploration ne m'a jamais donné cette impression. Comme le dit Duhamel, (à part peut-être la pendaison, je crois que c'est d'Oshima, j'ai vu ça il y a fort longtemps) tout est montré. Dans la photo aussi,il me semble. C'est bien le problème. L'entreprise de l'artiste dans ces domaines, consisterait selon moi à chercher les moyens techniques de produire cette émotion en produisant de l'épaisseur, de la complexité, de la superposition de codes. Bon courage les gars, vous avez du pain sur la planche.

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  10. Moi, si c'est un argument, j'ai plus ressenti le besoin de revoir des films que de relire des livres. Justement parce que c'est très riche (trop pour Duhamel et Sig ?).
    Mais c'est aussi pour ça, il ne faut pas être hypocrite, que la musique est rarement de l'art en elle-même, ou les dialogues de la littérature, ou les images des photos ; mais est-ce le but ?
    Le cinéma n'est pas là pour rassembler toutes les particularités des autres arts, il a son originalité propre.

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